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[CRITIQUE] : Journal d'une Femme de Chambre


Réalisateur : Benoit Jacquot
Acteurs : Léa Seydoux, Vincent Lindon, Vincent Lacoste, Clothilde Mollet,...
Distributeur : Mars Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français, Belge.
Durée : 1h35min.

Synopsis :
Début du XXème siècle, en province. Très courtisée pour sa beauté, Célestine est une jeune femme de chambre nouvellement arrivée de Paris au service de la famille Lanlaire. Repoussant les avances de Monsieur, Célestine doit également faire face à la très stricte Madame Lanlaire qui régit la maison d’une main de fer. Elle y fait la rencontre de Joseph, l’énigmatique jardinier de la propriété, pour lequel elle éprouve une véritable fascination.


Critique :


Même si elle a la réputation d'être aussi expressive qu'un recoin de porte et qu'elle agace plus d'un cinéphile, force est d'admettre que l'on aime beaucoup la jolie Léa Seydoux par chez nous, et pas uniquement parce qu'elle a le mérite d'avoir une plastique des plus attirantes pour les hommes que nous sommes.

Actrice de talent qui squatte de manière régulière nos salles obscures hexagonales, dans des péloches plus (La Vie d'Adèle, Grand Central, The Grand Budapest Hôtel, Saint Laurent pour les plus récents) ou moins (La Belle et la Bête, qui compte au moins pour 5) inspirées, elle a pour elle le mérite de toujours s'attacher à des projets qui font parler d'eux ou même, qui attise méchamment l'attente des spectateurs.

Pour preuve son attachement au casting du prochain 007, Spectre, signé Sam Mendes, ou elle incarnera à coup sur, une James Bond Girl de charme.


Mais si elle fait l'actualité cette semaine, c'est pour sa présence au sein du nouveau film de l'excellent Benoit Jacquot - qu'elle retrouve près de trois ans après le très beau Les Adieux à la Reine -, Journal d'une Femme de Chambre, ou l'ambitieuse adaptation du célèbre roman d'Octave Mirbeau, déjà adapté dans le septième art hexagonal par Renoir en 1946 mais également en 1964 par Luis Buñuel, avec Jeanne Moreau en vedette.

Pour l'amoureux des femmes qu'est Jacquot, il y avait une certaine évidence à le voir s'attacher à l'itinéraire de l'énigmatique Célestine, femme de chambre courtisée pour sa beauté et spectatrice idéale du " luxe bourgeois " de l'époque, une femme forte, indomptable et au caractère bien trempé qui personnifie justement, l'image de Seydoux au sein du septième art hexagonal.

Dans la peau de cette héroïne rebelle jamais à sa place (que ce soit dans son paysage, son emploi ou même son époque), se battant contre son éducation et pour quitter son destin insatisfaisant, tantôt maline et séductrice, tantôt menaçante, insolente et d'une noblesse remarquable; l'actrice en tout point sensuelle et resplendissante, porte le film sur ses larges épaules et signe indiscutablement l'une de ses plus belles performances à ce jour.


Sensiblement plus fidèle au roman d'origine et d'un ton étonnement sombre, le film de Jacquot dénonce avec intelligence la vieillissante bourgeoisie de la fin du XIXeme siècle, parangon de la servitude, de la misogynie (le statut de la femme ne se résumait qu'à sa soumission face à l'homme), des inégalités (salariale notamment) et des discriminations sociales (l'antisémitisme et le sexisme surtout) à coups de dialogues finement scriptés et d'un scénario au classicisme profondément moderne.

Porté par une remarquable reconstitution historique à tous les niveaux (des costumes aux villas et jardins) mais également par un bon gout de placer ses personnages au sein de décors joliment épurés, une réalisation aussi sobre qu'élégante ainsi que des personnages ambigües et hauts en couleurs (Clothilde Mollet y est convaincante tandis que Vincent Lindon lui, mutique et inquiétant en Joseph, est toujours aussi merveilleux), Journal d'une Femme de Chambre est purement et simplement un brillant tour de force.

Une captivante, juste et fascinante peinture d'époque pourtant infiniment intemporel et profondément d'actualités vu ses nombreux - et bouillonnants - thèmes abordés.


Audacieux, sensuel et mystérieux, prenant même si un peu lent parfois et d'un naturalisme constant, le film de Benoit Jacquot est une intense et cruelle chronique sociale, un beau et lumineux drame qui confirme - si besoin était - quelques mois après le sublime Trois Coeurs, que le cinéaste est décemment l'un des plus plaisants à suivre du cinéma français actuel.


Jonathan Chevrier



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