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[CRITIQUE] : L'Interview Qui Tue !


Réalisateur : Seth Rogen et Evan Goldberg
Acteurs : Seth Rogen, James Franco, Lizzy Caplan, Randall Park,...
Distributeur : Sony Pictures Releasing France
Budget : 44 000 000 $
Genre : Comédie.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h05min.

Synopsis :
Un animateur de talk show et son producteur se retrouvent impliqués dans un complot meurtrier à l’échelle internationale.


Critique :

Comment renouveler, voir même dynamiter tant qu'à faire, une comédie américaine contemporaine paresseuse et profondément engluée dans ses sales travers de productions familiales et populaires ?

C'était la putain de question à un million de dollars que s'était posé le génial Seth MacFarlane en 2012 (et cette année également, via son très sympathique Albert à L'Ouest), avec son gentiment piquant Ted.
Mais c'est surtout LA question que s'est également posé l'excellent Seth Rogen, pour la conception de son premier long fin 2013, C'est la Fin, cornaqué avec son comparse de toujours Evan Goldberg.

Digne successeur de la méthode Apatow, les deux ont donc décidés d'arpenter, tout comme MacFarlane, la voie casse-gueule du trash, pour se démarquer du lot.
Sauf que contrairement à la peluche vivante fumeuse de crack, les deux lascars avaient décidés de faire grimper d'un gros cran, les limites du politiquement correct au cinéma.


Résultat, This is The End incarnera un bon gros carton au B.O. mais surtout un (très) gros fuck sur pellicule, de la part d'une pléthore d'acteurs lassés - tout comme le public -, d'un genre de plus en plus mourant.
Une expérience cinématographique savoureusement conne, drôle et vraie, qui imposait Rogen comme le nouveau roi de la comédie made in US, aux côtés de Sandler et Ferrell, rien que ça.

Foutrement ambitieux, le bonhomme remettait donc le couvert à peine un an plus tard avec The Interview aka L'Interview qui Tue par chez nous - encore un titre français irrite un brin -, dont le buzz et l'acharnement médiatique autour de sa sortie défraya littéralement la chronique au sein du monde du septième art, la faute à son sujet qui fâche (tâche).

Ou quand un simple délire ciné entre potes vire au drame politique international...

En effet, le film conte comment un animateur de talk show poubelle, David Skylark, et son producteur se retrouvent impliqués dans le complot de la CIA visant à liquider le big boss ultime de la Corée du Nord, Kim Jong-Un en personne, lorsque le premier doit interviewer ce dernier, grand fan de lui.
Étant donné que les relations entre les deux pays ne sont pas (l'ont-elles déjà été un jour ?) au beau fixe, inutile de préciser que le pari du duo était on ne peut plus oser, voir même un poil trop culotté.


Pas franchement amateur de l'humour made in america - et encore moins quand il en est la cible -, Kim Jong-Un avait assuré il y a quelques mois, que si The Interview débarquait dans les salles obscures (une péloche qui sonnait comme « un acte de guerre intolérable » selon lui), de graves représailles frapperaient les USA et plus particulièrement Sony Pictures.
Et ça n'a pas raté puisque depuis plusieurs semaines maintenant, la major a été visée par un groupe de hackeur ayant déballée sans états d'âmes, plus d'un dossier qu'elle gardait secrètement dans ses tiroirs.

En pétard, la guerre entre Sony et son ennemi invisible aura in fine poussée la firme (la faute à des menaces terroristes, rien que ça) à annuler la sortie du film avant de le balancer en VOD à tous les cinéphiles ayant la curiosité de le mirer (soit énormément).

Un bien beau bordel pour une péloche qui avait su méchamment nous attirer ses derniers mois et qui n'avait pas forcément besoin de tout se tapage pour se faire attendre, puisqu'au final, le grand perdant de cette grosse publicité non désirée reste le film de Seth Rogen et Evan Goldberg, boycotté des salles et incarnant malgré lui un potentiel objet de culte pour des spectateurs voyant leurs exigences grimpés à son sujet à mesure qu'il aura fait parler de lui.

Car elle est là, au fond, la vraie question que l'on s'est tous posé en ce mois de décembre ou L'Interview qui Tue aura fait l'actualité : est-il réellement un film qui mérite de faire parler de lui, qualitativement parlant ?


Loin de l'objet de la peur/propagande que son buzz a bien voulu faire de lui, et encore moins de l'image de porte-parole du monde libre/anti-censure que l'on a pu (supposément) lui coller sur le dos de la pellicule, The Interview incarne avant tout et surtout une comédie foutrement irrévérencieuse, un putain de nanar délirant et surréaliste, volontairement con comme ses pieds et qui ose tout ou presque sans le moindre remord.

Ici point de critique de la société contemporaine, des médias et du traitement de l'information, point de vision engagée et protestataire contre le régime politique (dictature) de certains pays ennemis des contrées de l'Oncle Sam.
Oui, L'Interview qui Tue est profondément américain, mais dans ce que son cinéma a de plus hilarant et bête.

Exit Charlie Chaplin, Woody Allen ou encore Peter Sellers, et bonjour les frangins Farrelly, Sacha Baron Cohen et le Apatow style sauce 007.

A partir d'un pitch tout simplement débile et improbable, Seth Rogen et Evan Goldberg accouchent d'une sympathique comédie, manquant cruellement de rythme entre deux gags certes mais muée par une envie de tout dynamiter tellement rafraichissante (ça flirte avec les genres, du film d'action au thriller en passant le film d'espionnage) qu'elle en est aussi excitante qu'attachante.


Jamais sérieux, référencé à la culture pop et plongeant tête la première dans la comédie purement satirique en se moquant délibérément - et sadiquement - de la Corée du Nord et de son leader Kim Jong-Un (on comprend très vite pourquoi le film a déclenché la rage des autorités Nord-Coréennes), le duo (et même trio avec James Franco) revendique constamment comme de véritables sales gosses incontrôlables, leur droit de parole et de libre expression.

Salement potache, gore, débile et naïf, ne renouvelant jamais le genre qu'il s'amuse pourtant à célébré sous toutes les coutures en accumulant tous ses passages obligés, de la bromance assumée et à la forte connotation gay (une habitude chez Rogen/Franco) aux blagues pipi-caca-prout-prout; la péloche n'hésite même jamais à tourner en dérision ses personnages (acteurs), que ce soit le journaliste incarné par un James Franco tout simplement parfait en benêt proche cousin d'Harry et Lloyd - Dumb & Dumber quoi -, ou le dément Randall Park, merveilleux en leader suprême dénué de tout charisme et manipulateur, aussi capricieux qu'un môme de huit ans et fan abusif de Katy Perry.

Les passages follement drôles qu'ils partagent notamment avec James Franco, valent presque à elle seule la vision d'un film à des années lumières d'être à la hauteur de son buzz, maladroit et un peu long mais hautement plaisant pour tout inconditionnel de l'humour con et gras véhiculé par deux des plus dignes représentants de l'écurie Apatow.

Une private joke euphorisante entre potos sur près de deux heures dans la veine du Dictateur, complétement suicidaire, inconsciente et souvent invraisemblable, au final guerrier purement génial.
Clairement un délire sur pellicule qui, hors contexte (merci Kim Jong-Un donc, en gros), n'aurait décemment pas dépasser le statut de simple comédie lambda aussi vite vue qu'oubliée.


Pas meilleur que C'est la Fin - et loin d'être catastrophique comme diront beaucoup -, et certainement pas moins pire que le décevant Nos Pires Voisins sorti cet été, avec L'Interview qui Tue, ce bon vieux Seth Rogen continue donc tranquillement mais surement son petit bonhomme de chemin au milieu des grands rois de l'humour made in USA.

On attend avec une impatience non feinte la suite de sa carrière derrière la caméra, en espérant tout de même qu'elle soit nettement moins médiatique et bien plus qualitative qu'ici.


Jonathan Chevrier


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