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[CRITIQUE] : Dom Hemingway


Réalisateur : Richard Shepard
Acteurs : Jude Law, Richard E. Grant, Demian Bichir, Emilia Clarke,...
Distributeur : Twentieth Century Fox France
Budget : -
Genre : Comédie, Policier.
Nationalité : Britannique.
Durée : 1h34min.

Synopsis :
Après avoir passé 12 ans en prison pour avoir gardé le silence, Dom Hemingway, célèbre pour savoir ouvrir le moindre coffre-fort, est de retour à Londres et a bien l'intention de récupérer ce qu'on lui doit !



Critique :

La seconde moitié des années 2000 n'a pas forcément fait du bien à Jude Law, passé de parfait gentleman/gendre idéal que tout le monde s'arrache à simple talent que l'on appelle pour l'occasion, la faute certainement, à quelques gadins au box-office mais surtout à des passages plus marqués qu'autre chose, dans les tabloïds peoples et sa relation rocambolesque avec la sublime Sienna Miller.

Mais à l'aube de la nouvelle décennie, un Jude nouveau a fait son apparition, plus humble mais surtout nettement plus remarquable, la preuve en est ces seconds-rôles on ne peut plus exceptionnels chez Steven Soderbergh (Contagion, Effets Secondaires), Martin Scorcese (Hugo Cabret), Wes Anderson (The Grand Budapest Hotel) et Joe Wright (le magnifique Anna Karenine), sans oublier sa présence au sein de la lucrative franchise Sherlock Holmes de Guy Ritchie.

Fraichement dans la quarantaine, la calvitie de plus en plus présente, l'ex-Sexiest Man Alive de l'année 2004 a pris de la bouteille, mais ça lui va vachement bien.
Quoi de plus bandant donc à l'idée de le voir débarquer aujourd'hui dans son rôle le plus décomplexé et délirant, aka celui de Dom Hemingway dans le film éponyme signé Richard Shephard, papa de l'excellent The Matador dans lequel il offrit justement à un autre talent british hautement mésestimé, Pierce Brosnan, l'un de ses meilleurs rôles.


Surtout que sur le papier, le film a tout pour faire méchamment saliver son cinéphile, un " Jude Law Show " sans filet ou le bonhomme peut cabotiner plus que de raison, c'est une proposition qui ne peut décemment pas se refuser en salles.

Dom Hemingway donc, ou l'histoire d'un bad boy qui a passé douze ans au mitard et qui compte bien rattraper le temps perdu en commettant tous les excès.
Mais en plus du quasi-obligatoire cocktail drogue-sexe-alcool, le Dom espère également récupérer une belle somme d’argent pour avoir gardé le silence durant ces longues années - soit sa part du magot d'un casse ou il n'a pas balancé son boss -, sorte de cerise sur le gâteau pour service pleinement rendu.
Sauf que même dans le plus délirant des mondes, tout retour dans la réalité ne peut décemment se passer comme prévu…

Autant le dire tout de suite, Dom Hemingway commence fort, très fort même, avec un long travelling sur un Jude Law salement gaulé à la bière et au front dégarni, qui goute au joie d'une turlutte royale par un de ses camarades de cellules, le tout en s'évertuant dans un monologue improbable de plusieurs minutes et déjà culte, à vanter les mérites de sa bite. True story.
Face caméra, le Jude vend sa bite comme on vend du chocolat de luxe, à coups de « Ma bite est exquise », ou encore  « Un tableau de ma bite devrait être exposé au Louvre », difficile de ne pas admettre que ça met bien dans l'ambiance, et que le personnage est posé.

En l'espace de quelques secondes, Law casse littéralement son image de beau-gosse et se fond complétement dans le costume d'Hemingway, un gangster à l'ancienne qui s'en tient à l'éthique du métier, un de ceux qui te citerait du Shakespeare avant de te latter les burnes le sourire aux lèvres au point que s'en serait même poétique.
Une vraie centrale nucléaire qui menace d'exploser à tout instant, et qui relâche la pression grâce à un débit verbal de folie, et un désintérêt total de la bienséance.



Le genre de type impressionnant, si seulement il n'était pas dans le fond, qu'un pauvre type, un loser qui a la gloire passée, qui ne sait pas la fermer mais surtout qui attire les problèmes comme la merde attire les mouches.

Dans un sens, on pourrait clairement le considérer comme un frangin barré du tout aussi déglingué Charles Bronson, tant leur folie et leur imprévisibilité semblent proches.
Sauf qu'à la différence du plus célèbre détenu d'Angleterre, le Dom n'est pas fan de la prison, et il cherche plus ou moins à devenir un bon gars aux yeux de sa fille, qu’il n’a pas vu grandir et dont la mère est morte d'un cancer pendant qu'il purgeait sa peine.

Parce que c'est qu'il y a un cœur qui bat derrière le masque de la (petite) grosse frappe...

Jonglant sur les deux tableaux du drame familiale et de la parodie hautement cynique, Shepard se montre cependant nettement plus habile pour enchainer les pitreries et les sketchs tous plus ou moins réussis, d'un Dom qui fait son show - et qui se ramasse souvent -, que pour crédibiliser les sentiments de son héros et sa quête de rédemption.
Une maladresse fortement dommageable dans le sens ou le film aurait mérité à totalement embrasser son concept loufoque, à l'instar des péloches des précieux Danny Boyle (Trainspotting en tête) et Guy Ritchie, plutôt que de s'embourber dans une accumulation de poncifs pour offrir à Dom un semblant d'humanité.


Parce que dans l'état, sans son traitement des relations familiales de son héros, Dom Hemingway fonctionne du tonnerre via une énergie démente et un rythme effréné ou une pléiade de personnages ne s’expriment que dans la démesure et ou Jude Law s'impose sans forcer, comme le roi des rois de l'outrance.
Toujours sur le fil du rasoir, décomplexé et impliqué comme jamais, le bonhomme impressionne tout du long et arrive même à susciter l'émotion dans ses face-à-face intime avec sa fille et même son petit-fils.

En pleine possession de ses moyens et trouvant constamment le ton juste, il porte le film sur ses larges épaules et bouffe littéralement l'écran et même tout ceux qui se trouve à l'intérieur, à tel point que l'on ne note pas réellement de performances pouvant lui rendre l'appareil, sauf peut-être Richard E. Grant, excellent en sidekick hilarant mais pas assez croqué.

Car c'est bel et bien ça à quoi ressemble, dans le fond, Dom Hemingway : un efficace divertissement sous forme de one man show époustouflant de la part d'un acteur talentueux, qui fait oublier toutes les maladresses et la prévisibilité d'un script dont il élève constamment l'intérêt et la qualité.

On appelle ça tout simplement, une performance à récompenses...


Jonathan Chevrier


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